LA PARTICIPATION DES JEUNES DANS LA GOUVERNANCE :
UNE VOIE QUI MENE VERS LE DEVELOPPEMENT DURABLE
Que
d’engagement rhétorique
Depuis
quelques années, la problématique de la gouvernance a été identifiée comme un
défi majeur que doivent relever tous les acteurs du développement.
L’ancien
Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies, Koffi Annan déclarait « la bonne gouvernance et le
développement durable sont indivisibles. De l’Amérique Latine à l’Asie en
passant par l’Afrique, tous nos efforts, toutes nos expériences le montrent.
Sans bonne gouvernance, sans état de droit, sans administration prévisible,
sans pouvoir légitime et sans une réglementation adaptée, les financements et
les dons les plus abondants ne sauraient assurer la prospérité ».
Il conviendrait aussi de préciser que la bonne
gouvernance ne sauraient être réalisés sans l’intégration effective de cette
catégorie qui constitue plus de la moitié de la population mondiale, je veux
nommer les jeunes, au processus de gestion et de prise de décisions collectives.
La bonne
gouvernance, s’entendant au niveau local, régional voire international, implique
la participation de tous les acteurs
sociaux, notamment les jeunes, l’évaluation de leurs besoins, leur information,
leur consultation, leur concertation et nécessite la codécision à toutes les
étapes de concrétisation des aspirations communautaires.
Il
semblerait que, au regard des instruments et des institutions et mis en place aux niveaux international,
régional et local, au regard des recommandations émanant des grandes
conférences des Nations Unies ainsi que des conférences tenues à l’échelle
régionale et nationale, tout est en
place pour une collaboration et une
implication directes des jeunes dans les programmes et plans d’actions de nos
communautés.
Déjà en
1995, l’Assemblée Générale des Nations Unies soulignait dans le cadre du plan
d’action mondial pour la jeunesse que « pour pouvoir progresser, nos sociétés doivent, entre autres éléments,
être capables d’incorporer ce que les jeunes peuvent apporter à la construction
et à la conception de l’avenir. Outre leur contribution intellectuelle et leur
pouvoir de mobilisation, les jeunes ont un regard neuf, dont il faut tenir
compte ». Mais on se rend compte que malgré cette déclaration de haut
niveau, l’état des lieux n’a pas évolué avec les mêmes diagnostics pessimistes qui se succèdent et se ressemblent,
du moins en ce qui concerne l’implication des jeunes dans les processus de
prise de décisions comme condition de bonne gouvernance.
S’inscrivant sur cette lancée, l’actuel Secrétaire Général Ban Ki-moon
avait promis lors de la présentation du plan d’action de son deuxième mandat en janvier 2011, la
nomination d’un Représentant spécial pour la jeunesse à l’instar de l’ONUFEMMES
pour les femmes ou de l’Unicef pour les enfants.
Mais
n’a-t-on pas l’habitude de dire qu’entre la théorie et la pratique, il y a
toujours un fossé décevant et la participation effective des jeunes dans la
définition, l’élaboration et la mise en œuvre des programmes et politiques
publics n’échappe pas à cette réalité.
La voix des
jeunes s’entend, s’entendent leurs aspirations ultimes
L’implication
des jeunes dans les actions de bonne gouvernance constitue une exigence de
démocratie et une garantie de respect de leurs droits fondamentaux. Elle rend
obligatoire la participation des jeunes au processus de prise de décisions.
Cette implication
des jeunes dont on fait allusion dans les grandes conférences et dans
les politiques des Etats, n’est en fait qu’une illusion. En réalité, il y
a plus d’engagement rhétorique à l’intégration des jeunes dans les processus de
prise de décisions comme base de politique intérieure ou étrangère, au regard
des nombreux défis auxquels la jeunesse est confrontée.
Des
difficultés de formation à la recherche
d’emploi en passant par les problèmes de santé, de violences et de délinquance
juvénile ainsi que d’autres risques sociaux, les jeunes se sentent
marginalisés, abandonnés à leur sort. Le plus souvent leurs causes ne semblent
pas être entendues ou prises en compte de manière efficace par la société.
Et cette
situation est beaucoup plus préoccupante en Afrique où la jeunesse fait face à un
manque criard d’accompagnement sur tous les plans alors qu’elle compose plus de
60% de sa population âgée de 25 ans et
65 % âgée de 30 ans. La jeunesse africaine souffre d’un mal d’éducation et de
formation, d’un mal de santé, d’un mal d’insertion professionnelle avec un taux
de chômage extrêmement élevé chez les jeunes qui les expose à un avenir incertain.
A cela s’ajoute la guerre et les conflits internes aux Etats qui dissipent tous
leurs espoirs et accentuent leurs misères.
N’a-ton pas
l’habitude de déclarer que la jeunesse est la force vive de nos nations,
l’espoir et la relève de demain. Mais la force de la jeunesse est généralement
utilisées à des fins politiques rendant évidente l’inégalité de traitement,
l’exclusion des uns, le favoritisme des autres. C’est en tout cas ce qui
ressort du constat qui peut être fait entre les jeunes adhérents au parti
politique au pouvoir et les jeunes non adhérents qui ne bénéficient pas des
mêmes avantages que les premiers car
leurs compétences et leurs profils mis à l’écart devant les mêmes privilèges
sociaux.
Cette
situation n’est pas sans susciter la réaction des jeunes un peu partout dans le
monde pour apporter un souffle de changement imposant la bonne gouvernance à
tous les niveaux.
La voix des
jeunes dans la voie du changement
Les préoccupations
des jeunes doiventfigurer parmi les questions prioritaires pour mériter une
attention plus sérieuse. Elles doivent être analysées comme des questions de
développement et de respects des droits humains.
Mais on ne
saurait réussir ce pari sans pour autant essayer d’intégrer la société des
jeunes et recueillir leurs idées, leurs points de vue. Cela constitue en effet une
source non négligeable d’imprégnation des maux et des besoins auxquels les
jeunes sont confrontés pour pouvoir mieux les prendre en charge.
Les jeunes
doivent être responsabilisés pour pouvoir aspirer à un changement positif et durable des
tendances actuelles. Mais cette responsabilisation doit au préalable répondre
au besoin de consultation des jeunes dans les prises de décisions.
Beaucoup de politiques et programmes élaborés à
l’endroit de nos communautés en général et des jeunes en particulier ont échoué
à cause du manque voire de l’absence de concertation avec les jeunes qui sont
les premiers et les principaux concernés.
Force est
de constater que la non prise en compte des voix des jeunes dans les processus
de gouvernance participative constitue un déni total à leur droit à la vie, à l’égalité,
à la participation et à la liberté.
Ainsi, en
mal d’accompagnement et de reconnaissance, plusieurs moyens d’expression sont
utilisés par les jeunes pour faire valoir leurs causes. A cet effet, des genres
musicaux comme le Rap ou le Slam, traduits dans des paroles engagées, dominent
et s’inscrivent dans un mouvement de fortes revendications sociales et
d’incitation à l’engagement de la jeunesse.
Les
nouvelles technologies de l’information et de communication, notamment les
réseaux sociaux sont aussi des porteurs de voix pour la jeunesse.
Mais l’un
des moyens d’expression les plus répandus ces dernières années et qui ont
apporté plus de changement ont surtout été les manifestations des jeunes dans
toutes leurs formes. A travers ces manifestations un peu partout dans le monde,
la jeunesse a démontré qu’elle est loin d’être une « spectatrice » du
non respect des principes de bonne gouvernance. Elle a su imposer sa force
physique et intellectuelle pour pouvoir apporter une ère de changement surtout
en ce qui concerne les attitudes antidémocratiques.
La révolution
Jasmin qui a pris ses débuts en décembre 2010 en est une illustration parfaite.
Comme l’effet de la peste, elle s’est propagée un peu partout dans le monde
arabe. Cette descente des jeunes dans les rues pour manifester les malaises
sociaux dont ils souffrent n’a pas épargné l’Afrique de l’ouest avec le cas sénégalais et
les villes de Londres en Grande Bretagne, entre autres.
Si
certaines de ces manifestations ont connu des répressions policières ou armées
violentes, d’autres par contre ont conduit à la prise en compte des revendications
sociales imposant le départ de chefs d’Etat ou le retrait de lois tyranniques
et arbitraires.
L’implication
des jeunes dans les processus de prise de décision, un impératif qui s’impose.
Mais quelle approche?
Ne dit-on
pas que les jeunes constituent la plus grande richesse et le meilleur espoir
pour toute communauté. Mais pour en avoir la confirmation, faudrait-il que la
jeunesse soit formée, motivée et imprégnée des principes de bonne gouvernance.
Dès lors se
pose l’urgence et la nécessité de l’implication effective et efficace des
jeunes à tous les niveaux de prise de décisions relatives aussi bien aux sujets
et problèmes les concernant directement que ceux qui affectent les communautés.
A cet
égard, les politiques de gouvernance locale peuvent être d’un apport considérable
et un cadre premier d’intégration, si elles tiennent compte des aspirations des
jeunes dans la gestion de proximité des affaires de leurs communes ou
communautés rurales.
Dans la
manière de prendre en compte la voix des jeunes
dans les processus de développement et de bonne gouvernance, une
nouvelle approche a été dégagée lors de la réunion de haut niveau de
l’Assemblée Générale des Nations Unies sur la Jeunesse en juillet 2011.
Cette conférence
internationale prône l’instauration d’un
dialogue intergénérationnel et la compréhension mutuelle à tous les secteurs de
décisions et de mise en œuvre des plans d’actions pour faire face aux défis de
l’avenir.
Pour
conclure, j’évoquerai juste la phrase magique des jeunes lors de notre dernière
réunion régionale de concertation sur la participation des jeunes au
développement durable et a la bonne gouvernance au Mali : « Ce qui
est fait pour la jeunesse, sans la jeunesse, n’est pas pour la
jeunesse ».
Le
développement international, particulièrement en Afrique ou la population est
jeunes, dépendra en grande partie de la participation des Jeunesse.
Un
développement durable sans la participation forte et centrale des jeunes et de
leurs organisations, est en effet impossible dans ce monde en construction.
Et c’est
pourquoi, maintenant, plus que jamais, il est nécessaire de développer un
nouveau paradigme en faisant des organisations de jeunesse la porte d’entrée
pour assurer leur participation en tant acteur a part entière, dans tous les
processus de transformation sociale et de
gouvernance.
Toute
personne à un potentiel porteur de progrès, et la jeunes peut constituer une
réponse pour elle même et pour la société.